Arrêté 12 oct 2011 abrogation

A jour le 4 août 2017

L’article 3 de la loi du 13 juillet 2011, prévoit que « les titulaires de permis… remettent à l’autorité administrative qui a délivré les permis un rapport précisant les techniques employées ou envisagées dans le cadre de leurs activités de recherches. »

Dés le 26 juillet 2011 l’administration adresse aux titulaires des 64 permis mais aussi aux pétitionnaires des dizaines de demandes de permis, un courrier leur demandant pour le 13 septembre « un rapport sur les approches techniques employées ou envisagées dans le cadre de vos recherches. Ce rapport devra démontrer la pertinence de votre démarche exploratoire compte tenu des nouvelles conditions de l’exercice de l’activité d’exploration des hydrocarbures définie dans la loi citée ci-dessus. » (loi du 13 juillet 2011).

Le 12 septembre, le conseil de Schuepbach produit deux lettres mentionnant le fait que la société « a l’intention d’utiliser le procédé de la fracturation hydraulique de la roche dans le cadre de l’exploration, puis de l’exploitation de la zone concernée par les permis susvisés. »

Total produit aussi le 12 septembre un rapport de 24 pages (trop lourd pour être téléchargé ici) dans lequel il mentionne entre autres « Phase 2… Aucun test de production n’est programmé ni envisagé au cours de cette phase et, partant, aucune opération de stimulation par fracturation hydraulique.
Néanmoins, au cours de cette phase, des recherches seront poursuivies pour développer des techniques de stimulation alternatives aux techniques de fracturation hydraulique de la roche.
De telles techniques seraient susceptibles d’être mises en œuvre dans les intervalles géologiques d’intérêt au cours de la phase 3, dans le respect de la loi du 13 juillet 2011 et des recommandations de la Commission nationale d’orientation, de suivi et d’évaluation des techniques d’exploration et d’exploitation des hydrocarbures liquides et gazeux, créée par son article 2. »

L’on voit bien que Total qui a probablement été à la manœuvre des amendements « Gatignol »  à l’Assemblée et « Biwer » au Sénat, détaillés dans la page précédente cherche à se positionner dans l’attente de la mise en œuvre des « expérimentations réalisées à seules fins de recherche scientifique sous contrôle public » et des « rapport au Parlement sur l’évolution des techniques d’exploration et d’exploitation et la connaissance du sous-sol français », mentionnés  à l’art. 4. de la loi du 13 juillet 2011.

Début 2013 le P-DG de Total déclare : « Les techniques de fracturation hydraulique vont continuer à évoluer, mais pour le moment, il n’y a pas d’alternative. La piste de la fracturation de la roche par arc électrique sur laquelle nous travaillons avec l’Université de Pau n’est pas concluante. En tout état de cause, les chances qu’un travail conceptuel de laboratoire se transforme en technique réellement utilisable sont faibles. Il faut compter entre dix et vingt ans pour développer une technologie de rupture. » Le Monde, Planète 11 janvier 2013.

Et en avril 2013 à l’occasion des auditions du rapport de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, OPECST, sur les techniques alternatives à la fracturation hydraulique pour l’exploration et l’exploitation des hydrocarbures non conventionnels, Bruno Courme Directeur général de Total Gas Shale Europe déclarait : « Aujourd’hui, il y a des avantages et des inconvénients pour les autres techniques mais il n’y en a pas une qui permette de reproduire les avantages de la fracturation hydraulique elle-même.« , l’Usine Nouvelle, 18 avril 2013.

Il est donc évident que Total sait que l’éventuelle rentabilité du permis de Montélimar, pour lequel il a fortement investi en rachetant Devon énergie Montélimar et procédé en 2010 à des levées de fonds auprès d’actionnaires alléchés par les informations financières provenant des états-unis, ne repose que sur l’utilisation de la fracturation hydrochimique.

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A l’issue de ce processus, l’arrêté du 12 octobre 2011 constate l’abrogation de trois permis ; Nant et Villeneuve de Berg pour lesquels le titulaire Schuepbach Energy LLC, a explicitement affirmé vouloir recourir à la fracturation hydrochimique pour conduire ses explorations, et Montélimar, car la ministre dit «ne pas être convaincue des explications des filiales de Total titulaires de ce permis

Texte intégral :

Par arrêté de la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement et du ministre auprès du ministre de l’économie, des finances et de l’industrie, chargé de l’industrie, de l’énergie et de l’économie numérique, en date du 12 octobre 2011, JO du 13 octobre, l’abrogation des permis exclusifs de recherches de mines d’hydrocarbures liquides ou gazeux suivants est constatée, par application de l’article 3 de la loi n° 2011-835 du 13 juillet 2011 :
« Permis de Montélimar », accordé aux sociétés Total E&P France et Devon Energie Montélimar SAS par arrêté du 1er mars 2010 ;
« Permis de Nant », accordé à la société Schuepbach Energy LLC par arrêté du 1er mars 2010 ;
« Permis de Villeneuve de Berg », accordé à la société Schuepbach Energy LLC par arrêté du 1er mars 2010.

Une semaine plus tôt, le 4 octobre Nicolas Sarkozy annonce à Alès, Gard à l’occasion du classement des Causses et Cévennes à ce même patrimoine ; « Je veux saisir l’occasion qui m’est donnée, pour vous confirmer qu’il n’y aura pas d’exploitation de gaz de schiste par fracturation hydraulique dans ce territoire d’exception. Les trois permis de recherche de gaz de schiste qui concernaient votre région seront donc abrogés. Dans les autres régions, grâce à la loi Jacob, les exploitants ne pourront pas procéder à l’exploration ou à l’exploitation des gaz ou des huiles de schiste et j’ai demandé à Nathalie Kosciusko-Morizet, que je remercie, de veiller à ce que leurs permis soient strictement limités aux activités conventionnelles. C’est clair et c’est définitif. »

La ministre a alors déclaré aux médias « Total déclare vouloir maintenant chercher des hydrocarbures classiques, donc non gaz de schiste, dans une zone où le potentiel est très limité et alors même que Total se désintéresse de la recherche du conventionnel sur le territoire terrestre français depuis des années… Et Total annonce aussi vouloir continuer à rechercher du gaz de schiste avec des techniques qui ne sont pas la fracturation hydraulique, or on sait aujourd’hui que ces techniques ne sont pas opérationnelles. » Les Échos 4 octobre 2011.

Le processus décisionnel passe par l’avis d’un groupe de travail du Conseil général de l’économie de l’industrie, de l’énergie et des technologies, CGEiet, le compte-rendu de la réunion du 10 octobre a été exceptionnellement rendu public, voir téléchargement en bas de page.
La section Régulation ressources du CGEiet y relève que l’administration ne lui a pas communiqué de motivation pour un projet de décision d’abrogation en forme concernant les permis de Nant, Villeneuve de Berg et Montélimar. Concernant les deux premiers le fait qu’il mentionnent le recours à la fracturation hydrochimique leur fait encourir l’abrogation. Concernant Montélimar elle estime « que ce n’est que dans la mesure où il serait établi que le rapport produit le 12 septembre serait insuffisant au regard des exigences du législateur que le permis encourrait l’abrogation. » Laissant ainsi les politiques à leurs responsabilités.

Les 61 autres rapports déclarent bien entendu, ne pas avoir l’intention de recourir à la FH… alors que nombre de ces permis étaient identifiés « non conventionnels » dans des documents officiels basés sur les notices techniques des pétitionnaires.

Il semble donc bien que ces trois abrogations ciblant uniquement les territoires où la mobilisation était la plus forte et préservant les intérêts franciliens de proches du pouvoir étaient fortement motivés politiquement. Comme le montre les libertés de forme et de calendrier prises par l’exécutif.

Schuepbach Energy LLC titulaire de Nant et VdB a déposé un recours contre l’abrogation de ces deux permis et dans le cadre de cette procédure à introduit le 12 juillet 2013 une Question prioritaire de constitutionnalité sur les articles 1. et 3. de la loi du 13 juillet 2011. Le 11 octobre 2013 le Conseil constitutionnel a rejeté cette QPC . Ces deux permis ont été définitivement abrogés par la décision du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 22 décembre 2015.

Les filiales de Total ont fait de même et gagné en première instance, le ministère à fait appel devant la cour administrative de Versailles, voir ici.

Nous demeurons vigilants car il est toujours possible que les articles 2 et 4 de la loi du 13 juillet 2011 soit appliqués et que le permis de Montélimar si in fine le Conseil d’État confirme sa validité, devienne le lieu d’expérimentations.

 

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RTL2011-835.Nant.Schuepbach.Fracking.110912
RTL2011-835.VilleneuveBerg.Schuepbach.Fracking.110912

RTL2011-835.AvisCGIET.Abrogation3Permis.111010

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