L’Institut international pour l’analyse des systèmes appliqués (IIASA), vient de publier une nouvelle modélisation du dérèglement climatique incluant la fonte du pergélisol. L’augmentation des températures favorise ce relâchement du méthane piégé dans les zones arctiques qui – une fois dans l’atmosphère – y contribue à son tour.
Déjà bien connus et documentés, les émissions de méthane par la fonte du pergélisol, sont pour la première fois intégrés aux travaux de l’IIASA sur le climat. Les chercheurs pointent surtout le phénomène très probable d’emballement incontrôlable du dépassement «temporaire» du «crédit carbone» inclut dans l’Accord de Paris. Dépassement maintenant en passe d’être accepté par les gouvernants, faute d’actions drastiques et concrètes ; demain il sera… trop tard ! En effet, mois après mois, de nouvelles études montrent que de plus en plus de «points de non retour» aux conséquences irréversibles à court et moyen terme sont atteint et dépassés. Aujourd’hui il semble que déjà le mot d’ordre est l’adaptation…
Traduction libre par nos soins (base GT*), les illustrations sont ajoutées, de :
Paris climate targets could be exceeded sooner than expected
Gasser T, Kechiar M, Ciais P, Burke EJ, Kleinen T, Zhu D, Huang Y, Ekici A, Obersteiner M (2018). Path-dependent reductions in CO2 emission budgets caused by permafrost carbon release. Nature Geoscience DOI 10.1038/s41561-018-0227-0 [pure.iiasa.ac.at/id/eprint/15453]
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Les objectifs climatiques de l’Accord de Paris pourraient être dépassés plus tôt que prévu
Une nouvelle étude a, pour la première fois, pris en compte de manière exhaustive la libération de carbone dans le pergélisol lors de l’estimation des budgets d’émission des cibles climatiques. Les résultats montrent que le monde pourrait être plus proche que prévu du dépassement du crédit carbone définit comme objectif à long terme de l’Accord de Paris sur le climat.
Les budgets d’émissions représentent la limite supérieure des émissions totales de dioxyde de carbone (CO2 -gaz à effet de serre -nde) associées au fait de rester en dessous d’une température moyenne globale spécifique. La simplicité du concept en a fait un outil attractif pour les décideurs politiques, qui doivent rester sous des niveaux dangereux de réchauffement, même s’ils dépendent fortement d’une relation linéaire entre l’augmentation de la température mondiale et les émissions cumulées de gaz à effet de serre dues à l’activité humaine. Dans leur étude, les chercheurs ont étudié l’impact des bilans d’émission actuels sur le phénomène de rétroaction non linéaire des émissions de CO2 et de méthane causées par le dégel du pergélisol.
Le pergélisol est un sol gelé toute l’année depuis au moins deux ans. En raison des longues périodes pendant lesquelles il reste gelé, le sol stocke de grandes quantités de carbone et d’autres nutriments à partir de la matière organique et représente donc un important réservoir de carbone, ce qui est rarement pris en compte dans les projections du réchauffement planétaire futur potentiel. La couche supérieure de pergélisol (la couche active) dégèle périodiquement en été, mais ces dernières années, la couche active de pergélisol s’est progressivement développée en raison de l’augmentation des températures. Cela signifie que plus de pergélisol dégèle et libère ainsi le carbone précédemment piégé dans l’atmosphère.
Le dégagement de carbone du pergélisol provenant de matières organiques précédemment congelées est causé par le réchauffement de la planète et diminuera certainement le budget de gaz à effet de serre que nous pouvons émettre tout en restant en dessous d’un certain niveau de réchauffement de la planète. C’est aussi un processus irréversible au cours de quelques siècles et peut donc être considéré comme un élément «basculant» du système carbone-climat de la Terre qui met à l’épreuve l’approximation linéaire du cadre du budget d’émission », explique Thomas Gasser, un chercheur du Programme des services et de la gestion des écosystèmes de l’IIASA et auteur principal de l’étude publiée dans Nature Geoscience.
C’est la première fois qu’un tel processus de basculement est correctement pris en compte dans les budgets d’émission et, selon les chercheurs, cela montre que le monde est sur le point de dépasser le budget de l’objectif à long terme de l’Accord de Paris.
De manière inquiétante, l’étude montre également que l’effet peut devenir encore plus important pour les trajectoires de dépassement. Dépasser signifie d’abord dépasser le niveau ciblé, puis redescendre vers la cible. L’Accord de Paris reconnaît explicitement une trajectoire de dépassement, culminant d’abord à «bien au-dessous de 2 ° C» et poursuivant ensuite ses efforts pour revenir à 1,5 ° C. Pendant la période de dépassement, cependant, la hausse des températures entraînera un dégel du carbone du pergélisol, ce qui entraînera une augmentation du carbone libéré qui devra être éliminé de l’atmosphère pour que la température mondiale diminue.
«Le dépassement est une stratégie risquée et revenir à des niveaux inférieurs après un dépassement sera extrêmement difficile. Cependant, comme nous sommes officiellement sur une trajectoire de dépassement, nous devons nous préparer à l’éventualité que nous ne revenions jamais à des niveaux de réchauffement plus sûrs. Les décideurs doivent comprendre qu’il n’y a pas de proportionnalité élémentaire entre les émissions cumulées de CO2 dues à l’activité humaine et à la température mondiale, comme on le croyait précédemment, et que le dépassement pourrait avoir des conséquences graves », explique Gasser.
Les chercheurs espèrent que leurs travaux auront un impact sur la communauté scientifique en démontrant que les budgets d’émissions ne sont pas un outil aussi simple qu’on le pense et qu’ils aideront également à informer les décideurs politiques lors de la conception de futures stratégies d’atténuation du climat.
* Google Trad.
.La fonte du permafrost menace la lutte contre le réchauffement climatique (étude) – AFP 17/09/2018 – 19:11
.Le pergélisol fond, le budget carbone aussi – Romain Loury, JDLE, 17 septembre 2018
.Paris climate targets could be exceeded sooner than expected – phys.org 17 septembre 2018
.Nature en anglais
.Les conséquences du dégel sur le sol de l’Arctique – Julie Lacaze, National Geographic, non daté
.Pergélisol, le piège climatique – Laure Cailloce, CNRS 26 janvier 2015
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